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TETU COMME UN ANE

Non, non, re-non, c’est non,
Écoute donc ce son
qui fait : non, non, non, non.
Je suis entré en résistance
Tu peux crier, gueuler, beugler
Tu vas bien voir la persistance,
La fermeté de mes idées.
Non, non, re-non, c’est non,
Écoute donc ce son qui fait :
Non, non, non, non.
Toute ma force, ma constance
Dans l’effort pour ne pas céder
Face à ton ire, ta rouspétance
Je serais le plus obstiné
Non, non, re-non, c’est non,
Écoute donc ce son
Qui fait : non, non, non, non.
Jusqu’à ce que ton insistance
Fasse plier, céder, craquer
Ma tête dure.    Quelle violence
Pour arriver,        à avancer,
      D’un pas.
 
manu
 
 
 
 
MOSAÏSTE D’OS
 
Mosaïste d’os, au départ ses parents ne pensaient pas qu’il s’agissait d’une orientation sérieuse.
À vrai dire, eux et lui n’avaient jamais vraiment été en osmose et ils se déclarèrent carrément hostiles à ce projet.
D’autant qu’en Australie, les écoles de mosaïste ne courant pas les rues, ils auraient de loin préféré le voir embrasser une carrière d’ostéopathe voire d’austère comptable.Il rongea son os dans l’attente d’auspices plus favorables, jusqu’au jour où, au cours d’un mortel week-end dans le Queensland, il entreprit des fouilles et excava un ossuaire, mettant à jour un crâne d‘australopithèque. Ce fut comme un éblouissement.
Il le nettoya, le brossa délicatement, en retailla soigneusement les contours et finit par le peindre d’un bleu du plus bel effet.
Sa découverte eut un écho retentissant et il abandonna les bilans comptables pour se consacrer tout entier à sa passion.
Au fil des ans, l’éventail de ses activités se fit plus large.
Il émailla des oscilloscopes, peignit ensuite des ostréiculteurs, cimenta des ostéoporosées, colora des hosties et redora des ostensoirs, incrusta des aussitôt dit aussitôt fait, ausculta des Osez Joséphine et travailla même sur des hospitalisations forcées et des Aux armes citoyens pour le compte du gouvernement français. Son œuvre majeure fut réalisée dans les années quatre-vingt, lorsqu’il exécuta sa célèbre mosaïque ‘Hospitalité slave et Osso-buco’ au cours d’un happening mémorable au siège du Ministère de la Culture austro-hongrois.
Il refusa ensuite énergiquement une commande intitulée ‘Ostracisme ostentatoire et UMP’ et, grâce à la polémique qui s’ensuivit, gagna encore en popularité. Il est aujourd’hui installé en Ossétie du sud et travaille d’arrache-pied au ciselage d’un Hosanna au plus haut des cieux’, une fresque monumentale à l’intention du musée d’art contemporain de Tel Aviv.
Sa vie, son œuvre, largement étudiées et commentées sont présentées sur le magnifique site www.Os à Moelle.com que je vous invite à consulter sans délai.
 
anne

 
 
L’HOMME QUI AVAIT UNE TÊTE À CLAQUES
 
Tant qu’à avoir une tête à claques
Autant en faire une vocation
Tout avait commencé dans la cour de récréation
Tous se défoulaient sur lui, vous savez comment sont les mômes
Il était couvert d’hématomes
Il rentrait chez lui, les joues en feu de toutes les baffes reçues
Jamais il ne se rebiffait, il était très fort en dedans, il se sentait bien au-dessus
Si quelqu’un l’interrogeait sur ce qu’il ferait plus tard
Il répondait fièrement : ‘Moi je serai tête à claques
Je ferai une grande carrière dans le spectacle’
Un jour il rencontra un grand escogriffe
Chapeau pointu, tout de blanc vêtu
Il était en quête d’un partenaire
Pour une tournée mondiale extraordinaire
Il lui dit : ‘Moi, je m’appelle Clown Blanc
Ça t’dirait d’en prendre plein les dents’ ?
Le petit n’y réfléchit pas à deux fois et répondit
‘Sûr, tu peux compter sur moi’
Du petit cirque de ses débuts
Il est à ce jour un artiste archi connu
Il sert tous les soirs de défouloir
À tous ces gens en mal d’espoir
Parfois il fait du conseil d’entreprise
Pour les cadres aigris, ça le grise
Ils lui cognent dessus comme des bêtes
Mais jamais il ne perd la tête
Z’avaient beau être forts à l’école
Aujourd’hui c’est lui qui ramasse le pactole
 
anne
 
 
Le cordonnier des vagues
 
Pour devenir le meilleur cordonnier des vagues, il a tout d’abord passé un c.a.p de ressemeleur de flaques. Il y apprit tous les rudiments de son futur métier, comme déclouer la semelle usagée, nettoyer la flaque, encoller et recoudre la nouvelle. Il obtint son diplôme avec mention plouf, ce qui lui permit de rentrer dans la Grande École Aquatique de la Chaussure. Il y fit des merveilles et ses travaux servent d’exemple, aujourd’hui encore. Parmi ses quelques oeuvres comme « les baskets tsunami », « les mocassins marée haute » et d’autres encore, arrêtons-nous sur ses fameuses « vague à l’âme boots ». Il lui aura fallu plus d’un an pour pouvoir les réaliser, tant la tâche était ardue. La première des difficultés fut de capturer la nouvelle vague, celle qui dérange et ne se laisse apprivoiser facilement. Il s’arma de patience, surfa sur la vague des émotions et attendit que la marée soit la plus basse pour pouvoir les monter. Il y cloua des talonnettes d’écume, y colla des semelles de plancton et laça le tout d’algues verdâtres. Ce chef-d’oeuvre avait une malédiction, la seule femme qui pourrait les porter devait avoir le coeur pur et épouserait notre cher cordonnier. Il attend encore !
 
malib
 

Il n’y a pas de fumée sans feu, il n’aurait jamais dû faire confiance à Marlon. Dorothy en était morte. Elle avait cassé sa pipe la môme.
Elle était étendue dans la cuisine, un tournevis fiché entre ses beaux yeux grands ouverts sur un reproche.
On lui avait pour ainsi dire coupé l’herbe sous le pied.
Bobby Bradson savait à l’occasion se montrer fort et courageux, mais n’était pas ce que l’on appelle communément un Dieu du stade. Il était capable de se défendre vaillamment, cependant il n’avait pas su protéger Dorothy.
Depuis des heures, il était coincé là, avec sa Dorothy et son air étonné, tantôt prostré d’accablement, tantôt tournant comme un lion en cage.
Comme il aurait aimé pouvoir lui offrir une vie différente ! Il l’aurait amenée loin de cette ville merdique, à des lieues du bitume délavé par la pluie pour se perdre dans les nuages d’un bonheur plan-plan.
Elle avait de beaux jours devant elle et elle était morte connement.
Elle était jeune et débrouillarde et aurait fini par percer dans ce show-business dont elle rêvait. Mais voilà, elle était tombée sur lui ! L’erreur ! Depuis leur rencontre, elle avait fait fausse route, s’enlisant toujours plus dans ses plans de galère.
Qu’allait-il bien pouvoir raconter à son frère ?
Il n’avait jamais vraiment gagné sa confiance, mais Dorothy avait tant et tant insisté, qu’en désespoir de cause, il leur avait donné son feu vert.
Elle s’était installée avec lui, croyant à une vie facile, un confort sans complications.Elle pensait dormir sur ses deux oreilles et Marlon avait fait irruption dans leur quotidien.Marlon, le beau gosse, le hâbleur, avait bel et bien coiffé Bobby au poteau.
Avec ses beaux discours, son air ténébreux, sa clope perpétuellement suspendue aux lèvres, il avait embarqué Dorothy dans son monde clinquant d’esbroufe et de faux semblants.
Bobby n’aurait jamais dû laisser faire cela, il aurait dû la protéger, lui servir de chaperon comme on dit dans les histoires à happy end.
Aujourd’hui, elle gisait inerte aussi glacée que le carreau de la cuisine et lui il pleurait comme un con ! Trop tard pour le bonheur !
 
Anne

 
 
« Ëtre le bras droit de quelqu’un »
 
Lorsqu’elle le mit au monde, Mme Froidemanche fut atterrée. On lui présenta son bébé. À une extrémité, elle vit bien des doigts, mais ce corps tout en longueur était vraiment étrange, il s’articulait à ce qu’elle considérait comme étant la taille et la tête était de même dimension que le reste du corps. Un court instant elle crut avoir accouché d’un serpent. «Votre enfant de sexe mâle est un bras droit « lui annonça le médecin. Interloquée la mère demanda comment le nourrir et quel style de vie inventer pour lui. Le médecin lui indiqua qu’il était tout à fait possible qu’il se nourrisse et respire par les pores de la peau et que n’ayant pas de problème de préhension, il pourrait attraper lui-même sa nourriture avec la main, il pourrait donc avoir une vie autonome. Il lui indiqua également que compte tenu de la forte demande actuelle d’organes, il pouvait tout à fait être greffé sur une personne ayant perdu son bras droit. Il ajouta qu’il serait tout de même préférable de le faire grandir, car on recherchait plutôt des bras d’adultes. Mme Froidemanche, encore sous le choc, demanda à réfléchir, tant de questions se bousculaient dans sa tête. Comment désormais vêtir cet enfant, il lui fallait revoir tout son trousseau, ne plus acheter que des gants et des manches, tenter de le faire grandir le plus vite possible pour qu’il puisse rapidement devenir le bras droit de quelqu’un. Mais auparavant il lui faudrait pourvoir à son éducation et à son apprentissage pour qu’il devienne un des meilleurs bras droits du pays et puisse faire une brillante carrière. Tant bien que mal, il fit quelques études, juste celles que son handicap lui autorisait car n’ayant ni pieds, ni jambes il était toujours en lévitation. Sa perception du monde était trop éloignée de celle des hommes. Il éprouvait des difficultés à se joindre aux autres, car tous ceux qu’il rencontrait avaient déjà deux bras et n’avaient que faire de lui. A l’âge de 20 ans il se présenta sur le marché du travail, il fut acheté par un homme politique, victime quelques jours auparavant d’un accident de la circulation,  qui en fit son bras droit. Dès lors, il ne fit plus qu’un avec cet homme et c’est lui qui écrivit tous ses discours, même si parfois il rechignait à obéir aux ordres qui lui étaient transmis. À vrai dire, il regretta très vite le temps où il n’était qu’un simple bras droit autonome.
 
Bernadette

 
 
Creveur d’écran
 
Je suis le creveur d’écran
Avec moi fini les films chiants
Je suis la terreur des salles obscures
Chasser les navets, je n’en ai cure
Quand je déboule dans le ciné
Soudain le silence se fait                               
Et si sur l’écran, un film mauvais est projeté
Je m’en vais de ce pas le déchirer et l’éventrer
Je suis le creveur d’écran
Avec moi fini les films chiants
Les superproductions font écran total
L’action directe me paraît vitale
Les américains me détestent au plus haut point
Et je leur rends bien sur la toile, avec mes poings
Je suis la terreur des salles obscures
Chasser les navets, je n’en ai cure
Je suis le censeur de films ratés
Si tu veux les projeter, va falloir patienter
Que je déchire en petits morceaux
Ton écran en dolby stéréo
Je suis le creveur d’écran
Avec moi fini les films chiants
Je suis la terreur des salles obscures
Chasser les navets, je n’en ai cure !
 
malib

 
 
ESSUYEUR D’AVERSES
 
Je naquis sous les tropiques, dans les îles Mi Corasson
Sous l’orage grondant des chaudes pluies de mousson
Le vieux sorcier qui aida à ma naissance
Prédit que je serai ‘essuyeur d’averses’ dès l’enfance
Ah, versez-moi donc du vin, moi dont l’eau a scellé le destin
Essuyeur d’averses, l’apostropha ma mère serrant son amulette
C’est pas une vocation pour un coupeur de têtes
Des générations d’ancêtres le maudiront
Enfin quoi sorcier, tu ne tournes pas rond !
Ah, versez-moi donc du vin, moi dont l’eau a scellé le destin
Aujourd’hui, courant l’île en tous sens,
Je chasse les nuages et brûle de l’encens
Je tire du canon, je gueule des chansons
Pour réguler au mieux toute l’eau des moussons
Ah, versez-moi donc du vin, moi dont l’eau a scellé le destin
Un jour prochain, je le sais bien
Sans une hésitation, je quitterai les miens
J’irai au Sahara me refaire le Karma
Car l’eau de pluie là-bas, paraît qu’on connaît pas !
Ah, versez-moi donc du vin, moi dont l’eau a scellé le destin
 
anne

 
 
« L’HOMME QUI a LES YEUX PLUS GROS QUE LE VENTRE »
 
Je suis l’homme qui a les yeux plus gros que le ventre…
Ma première humiliation, l’ophtalmo, à l’âge de 8 ans, constatant mon visage et avisant la taille de mes yeux, se trouva totalement dépourvu à me trouver des verres correcteurs adaptés. Le comble de ma vie, une paire d’yeux gigantesque qui me condamnait à rester dans le flou le restant de ma vie.
 
Je suis l’homme qui a les yeux plus gros que le ventre…
Ma deuxième humiliation, j’avais (et j’ai toujours d’ailleurs) un appétit d’oiseau. Au fur et à mesure des années le phénomène s’amplifia, si bien que mon corps ne se développa pas normalement et la nature m’affubla d’une silhouette de gringalet. Cela n’a évidemment pas empêché mes yeux, eux, de continuer à manger mon visage, rendant presque invisible nez, bouche, pommettes et front. A l’âge de la puberté, le moins qu’on puisse dire c’est que j’avais un faciès complètement disproportionné, accentué par un physique squelettique. J’avais quelques années devant moi pour m’y habituer.
 
Je suis l’homme qui a les yeux plus gros que le ventre…
Ma troisième humiliation, la dernière ici racontée, mais non la dernière qui me soit arrivée.
Au-delà du fait que mon physique est à priori peu engageant, j’ai quand même réussi à l’âge de 22 ans à avoir un rencard avec une fille de la fac. Nous avons convenu de nous retrouver en début de soirée au Bergerac (petit troquet intimiste) et au cours d’un apéro anisé, nous avons bavassé pendant quelques heures… mais nos regards ont eu bien du mal à se croiser. Tu parles d’une soirée yeux dans les yeux ! Bref, ça n’est pas le plus mauvais souvenir de la soirée. De discussion en discussion, le sujet revenant toujours sur mes particularités, je comprenais lentement que ce n’était que la curiosité qui m’avait valu ce rendez-vous qui n’avait absolument rien de galant, mais plutôt un arrière-goût malsain. Je me suis senti d’une grande tristesse, comme un enfant je n’ai pas pu retenir mon émotion, et me suis mis à pleurer. Elle s’en est allée, j’ai continué à pleurer, j’ai commencé à inonder le bar de mes larmes et je me suis alors fait chassé !
 
Celine b

 

« Il n’y a pas de fumée sans feu » affirma le vieil indien en tirant sur son calumet bien rempli. « Couper l’herbe sous le pied », le petit dernier de la tribu buvait ses paroles. Être un dieu du stade était son but et l’ancien allait l’aider. « Soit comme un lion en cage, contrôle tes émotions, ne te perds pas dans les nuages de la facilité et du confort » lui conseilla-t-il. Il avait de beaux jours devant lui avant l’épreuve finale, sans faire fausse route le voilà au travail de bon matin. Il s’entraînait tellement que le soir venu, il lui arrivait de tomber là, sur place et de s’endormir sans même manger. On lui donna enfin le feu vert pour participer aux premières olympiades interethniques, il partait favori. Il savait qu’il pouvait dormir sur ses deux oreilles, les esprits le protégeaient. Il coiffa au poteau tous ses adversaires. Sa victoire fut si éclatante que personne n’en fut jaloux et tous vinrent le féliciter. Ils fêtèrent l’évènement avec des musiques et des danses, et servirent du chaperon qui régala l’assistance.
 
Malib
 
UN TIREUR DE VER DU NEZ
 
Je tire les vers du pif
Des nez creux aux nez les plus fins,
Que vous soyez atone ou expressif
J’explore de toute façon votre tarin.
Pied de nez, je piégerais toutes vos pensées.
Si cous êtes nasillard,
Je connais l’art et la manière,
De venir fouiller dans votre radar,
Et en faire sortir les vers.
Pied de nez, je piégerais toutes vos pensées.
 
 
QUI VOLE UN OEUF VOLE UN BOEUF
 
Le folatile, voleur à l’étalage
Vir’volte autour d’l’œuf et subtilise
La forme ovoïde tel magicien.
Ensuite, s’envole en pleine euphorie
Effet de la beu volée au voisin.
Un œuf pour faire la teuf à la folière,
Se dit-il, suffira à faire l’affaire,
Bien sûr après avoir bleufer le bœuf,
Qui à travers l’œil de la grange voisine,
Surveille les vols planés des poulets,
Qui tentent d’interpeller les drogués,
Toucomme les pauvres poules effarouchées.
Voltigeur de haut vol, doux euphémisme,
Pour les vilains voleurs évaporés.
Vélo dans leur vortex-e cérébral,
De vouloir voler œuf et bœuf à la fois,
Alors que l’œuf est dans la volière
Et que la beu pousse dans les champs autour.
 
Céline B

 
 
Le garçon qui avait les deux pieds dans le même sabot
 
Georges est né un beau jour de printemps. Ce fut l’événement le plus important de sa famille car il était attendu depuis longtemps. À sa naissance on ne remarqua pas son anomalie, c’est seulement quand il essaya de se dresser que l’on s’aperçut qu’il n’avait que deux demi-pieds ! Pour pouvoir tenir debout il fallait les attacher ensemble, ainsi il pouvait tenir en équilibre. Par la suite son père lui confectionna un unique et magnifique sabot et c’est en sautillant qu’il allait à l’école. On connaît la légendaire cruauté des enfants et ceux de son école l’étaient particulièrement, Il se fit traiter de tous les noms : ressort ambulant, pois sauteur, unijambiste et bien d’autres encore. Il se sentait rejeté et malgré l’attention que lui portait son instituteur, il déprimait à longueur de journée, maudissant la nature pour ce cadeau empoisonné. Il était assez bon pour les études, mais étant dispensé d’éducation physique, il n’arrivait pas à s’intégrer dans le groupe. Le jour de la grande kermesse arriva avec tous ses stands et toutes ses  épreuves farfelues. Il voulut y participer, mais rien ne lui convenait. Il allait partir quand soudain un haut-parleur annonça qu’il restait des places pour la course en sac qui allait commencer. Tous ricanèrent quand il se présenta sur la ligne de départ, mais tous l’acclamèrent à l’arrivée, qu’il franchit avec plusieurs mètres d’avance sur les autres concurrents.
Depuis ce jour il fut respecté de tous et l’on dit même qu’il fut sélectionné pour le championnat du monde de course en sac.
Moralité : On peut prendre son pied même s’il faut pour cela les attacher ensemble.
 
Malib

 
 
Passeur de nuit blanche.
 
Je m’appelle Gunnar Snorre Helgason et je vis à Reykjavik. L’hiver, je peins les nuits sans fin islandaises, mais l’été, dès que les touristes débarquent sur mon île, je suis ouvert à toutes propositions.
Je suis passeur de nuits blanches, comme mon père avant moi. Alors dès le mois de juin on m’appelle :
« Allô Monsieur Helgason, ce soir vous pouvez ? »
« Oui Madame Modiano, pas de problème Madame Modiano »
Madame Modiano, c’est ma cliente préférée, il faut pas lui en promettre, un vrai papillon de nuit. Mais quand je dis que je suis disponible, on reste dans le correct. Simplement les touristes, ça les désorientent ces journées qui s’étirent. Alors moi je suis là pour donner du rythme, parce que sans rythme on dépérit. Je suis un peu comme une horloge.
« Il est minuit Madame Modiano » Je dis à Madame Modiano
mais si c’était Monsieur Cohen, je dirais « il est minuit Monsieur Cohen »
Madame Modiano, Monsieur Cohen et les autres me sont très reconnaissants de ce timing. Aussi les longues nuits blanches de Reykjavik ne sont plus éternelles, elles swinguent et c’est ce qu’ils veulent.
 
Pascale
 
 

AVOIR LA MAIN BALADEUSE …


 Je m’appelle Raymond Heurtebise, au bureau on m’appelle Monsieur Raymond et pour les copains c’est Roro. Je suis célibataire et c’est bien comme ça parce que j’aimerai pas qu’une bonne femme vienne mettre le nez dans mes affaires. D’autant plus que mes affaires, moins on s’y intéresse mieux je me porte, parce que ma mère quand elle m’a mis au monde a pas été foutue de faire ça correctement. C’était pas une lumière ma mère, mais pondre un moufflet c’est quand même pas sorcier. Je suis sorti normal, tout où y fallait, sauf la main. Comme ça, on dirait pas, mais j’ai une main, la gauche, avec le temps, qu’est devenue individualiste. En plus, ça serait une paluche de mec, ça irait, mais c’est un truc de femme. Elle se barre tout le temps et puis vas-y que je touche les bonshommes et que je les titille, c’est pas correct ça !

 Ma main elle s’appelle Léonie, c’est le nom que je lui ai donné parce que c’est une vraie lionne ; quand elle veut quelque chose, rien ne la retient. Et moi je suis là, j’attends madame, quelle finisse ses petites affaires. Un jour j’ai décidé que ça suffisait comme ça, alors j’ai pris une grosse aiguille de boucher, un fil bien costaud et j’ai cousu Léonie à mon bras. Mais la saleté a réussi à séduire ma main droite et l’a persuadée de couper les fils. Du coup l’autre s’est demandé pourquoi ça serait la seule à pas faire sa vie. Léonie l’a aidé à s’émanciper et voilà que les deux font la noce ensemble.

 J’ai essayé de me faire greffer deux autres mains, mais Léonie et sa copine ça les arrangeaient pas d’avoir quelqu’un au bercail quand elles rentraient de leur nouba. Alors comme je suis pour la paix des ménages, J’ai dit à mes mains qu’il fallait qu’on cherche un arrangement et qu’elles pouvaient pas se tirer comme ça. On a trouvé un terrain d’entente, la nuit quand je dors, elles font ce qu’elles veulent, mais dans la journée, on reste à la colle, d’abord pour le qu’en dira t- on, et puis pour toucher le cul des filles au bureau, c’est quand même plus pratique d’avoir ses deux mains.


   Pascale